Exceptionnel : buffet LEMOINE d’époque Napoléon 3 en provenance du Sénat.
C’est l’histoire d’un meuble exceptionnel, dont l’estampille fut mal lue par l’expert, qui l’attribua à “LEMONIER, Ebéniste fournisseur de l’Empereur et de la couronne.” Or ce Lemonier est inconnu au bataillon ; étrange, pour un fournisseur de l’Empereur. Heureusement, il y avait l’adresse, « 17 rue des Tournelles, Paris. » Prestigieuse adresse, qui abrita la célèbre maison LEMARCHAND. C’est Louis-Edouard Lemarchand, fils de Charles-Joseph (1759-1826) qui s’y installe en 1828. Le site du Musée d’Orsay poursuit : « En 1846, il s'associe avec André Lemoyne (ou Lemoine) à qui il laisse l'entreprise en 1852. Henri Lemoyne (né à Paris en 1828) succède à son père en 1863 ; tous deux sont fournisseurs brevetés de Napoléon III. » L’ébénisterie sera plus tard reprise par la prestigieuse maison Jeanselme.
Je me penchai sur l’estampille imprimée au dos du meuble. Quelques lettres difficiles à déchiffrer ; d’autres effacées. Premier constat : si « Lemonier » il y a, alors c’est « Lemonie », sans « R ». En y regardant de plus près, je finis par comprendre que l’expert a interverti le « I » et le « N », à cause d’un défaut du bois. Il s’agit donc bien de LEMOINE ! Nom d’ailleurs précédé du « H » d’Henry. La suite de l’estampille précise « Succr » pour « successeur », car il a succédé à son père et à Lemarchand. L’estampille LEMARCHAND–LEMOINE des années 1840 est extrêmement rare. « Une table Lemarchand-Lemoine est notamment conservée au Musée d'Orsay à Paris, précise le Musée.» Qu’elle ne fut ma surprise, dès lors, de déchiffrer la première ligne partiellement effacée de l’estampille : « AMEUBL... CHAND. » Et oui... «AMEUBLEMENT LEMARCHAND » ! Parbleu ! Certes, il s’agit de l’estampille des années 1860-70. Mais tout de même... Elle nous apprend aussi que Henri Lemoine a conservé le nom LEMARCHAND pour son ébénisterie.
Une estampille c’est aussi un gage de qualité—ici, exceptionnelle, et appliquée à un meuble d’autant plus rare qu’il s’agit d’un meuble de métier, aux proportions impressionnantes ; une commande du gouvernement de Napoléon 3 pour meubler le Sénat ! Où il est resté de longues décennies avant d’être relégué dans les collections jusqu’à la semaine dernière.
Il s’agit d’un somptueux buffet en acajou massif ; les deux portes centrales ouvrent sur 5 tiroirs coulissants aux magnifiques plinthes acajou. Sur chaque côté, 4 tiroirs épais munis d’une serrure fonctionnelle d’origine (avec clé) et d’une poignée de tirage en acajou. Le tout encadré par deux colonnes de tiroirs pleines d’autorité, et surmontées par un plateau immaculé. Tout, dans ce meuble, est luxe, calme et volupté. Les fonds des tiroirs eux-mêmes sont superbes ! Au dos du meuble, à côté de l’estampille et de l’étiquette du dernier inventaire du Sénat, on a une coupe sur l’assemblage de la partie haute avec des queues d’aronde d’une finesse folle, que l’on retrouve sur les côtés des tiroirs : une netteté et une finesse impressionnante.
Autre point notable : l’état du meuble, que l’on dirait fraîchement sorti de la rue des Tournelles tant le vernis au tampon est rutilant, tant la serrure deux points en laiton fonctionne bien, tant les tiroirs coulissent, s’arrêtant en bordure du meuble grâce aux pignons latéraux, discrètement insérés à l’intérieur. Jusqu’à l’odeur, ce meuble subjugue. Il n’a que des défauts insignifiants en dehors de 3-4 cm du bord de baguette de la porte de droite manquants, du fond sous les tiroirs légèrement fendu (invisible, donc, et sans incidence aucune) et du vernis vaguement insolé. En dehors de cela, massif, sûr de lui, d’une beauté et d’une qualité troublantes, il éblouit par sa stature impériale et son glorieux pedigree.
L : 206 cm. H : 120 cm. P : 62 cm.
Le prix est ferme, merci.
Livraison possible en idf et rdc pour 40 euros.